Qualification Jeux Paralympiques Tokyo 2020
Qualification Jeux Paralympiques Tokyo 2020 – Mars 2020, le match tant attendu est arrivé, nous le préparons depuis plus d’un an. Après notre échec aux championnats d’Europe 2019, où nous avons laissé échapper notre première chance de nous qualifier pour les Jeux paralympiques face au Danemark en ne finissant que troisième (seulement 2 places qualificatives), nous voilà arrivés en demi-finale du Tournois Qualificatif Paralympiques, la dernière chance pour espérer faire partie de l’avion pour Tokyo cet été.
…
Chaque match a été joué un à un,
sans se précipiter, en préparant parfaitement chaque tactique, en gérant le physique et la récupération pour être prêts. Nous avons écarté la Suède, le Brésil, la Colombie. Il ne reste que ce match pour aller chercher une des deux places qualificatives restantes.
Les résultats précédant nous font tomber contre l’Allemagne, seul le gagnant sera qualifié.
Nous savons que depuis plusieurs années nous battons ce pays régulièrement, mais nous disions la même chose pour le Danemark… Ici la pression n’est pas la même, avec en jeu un rêve que nous avons tous depuis tant d’années.
La tactique est prête, le discours du coach nous booste, le physique est présent, il n’y a que la « tête » qui pourrait nous perturber, nous sommes nos propres adversaires.
Le match démarre
sur un gros rythme que nous imposons, nous récupérons très vite des ballons que nous concrétisons en points. Les Allemands jouent leur vie, ils savent qu’ils sont challengers et donnent tout. Très vite nous prenons les rênes du match mais la pression reste intense, car l’avance n’est pas assez grande pour nous mettre totalement à l’abri. Les Allemands pourraient revenir à tout instant si nous ne restons pas vigilants et appliqués.
+9 à la mi-temps, nous pouvons souffler un peu, à 16 minutes d’atteindre notre objectif, nous devons rester concentrés, tout donner et ne rien regretter.
Nous continuons à creuser l’écart,
chaque joueur participe à la fête avec des changements réguliers demandés par le coach.
Lorsque je sors pour la dernière fois, au milieu du dernier quart-temps, l’écart est tel qu’un grand sourire s’affiche sur mon visage. Je sais dans ma tête que c’est quasiment fait. Le stress retombe et est remplacé par de l’impatience. Impatient que sonne la fin du match et de pouvoir savourer le rêve de toute une vie. Je suis aux côtés de Chriss. Nous regardons de plus en plus paisiblement les coéquipiers finir le travail en discutant de certains mouvements, mais nous ne pouvons pas nous empêcher de laisser s’échapper quelques « ça y est, nous y sommes », « nous l’avons fait » même si le match n’est pas encore terminé. J’ai beau me retenir, mes yeux s’humidifient en même temps que mon impatience devient si grande que je n’arrive plus à rester en place.
« 3-2-1…0… la joie explose, l’émotion est immense. »
Certains pleurent de joie, d’autres font des gestes bizarres montrant qu’ils sont heureux. Nous nous serrons chacun dans les bras l’un de l’autre, nous nous félicitons, j’ai du mal à retenir mes émotions.
Depuis le temps que j’attends ce moment, j’ai du mal à réaliser. Je repense à tout ce temps passer sur les terrains, à m’entrainer depuis mes 10 ans, faire des kilomètres seul autour d’une piste, encaisser de nombreuses séances de musculation, de cardio à cracher mes poumons, les matchs et compétitions qu’il m’est arrivé de perdre, mes échecs, mais aussi les fois où j’ai réussi et la joie que ces moments ont pu m’apporter.
Tous les sacrifices que j’ai pu faire depuis tout petit, loin de ma famille, de mes amis, souvent dans un gymnase au lieu de sortir les voir, rater un anniversaire, un repas de famille. Les nombreux kilomètres de trajet que j’ai pu faire en minibus. Je me suis toujours dis que ma carrière sportive serait ratée si je ne faisais pas au moins une fois les Jeux, maintenant c’est sûr, j’ai enfin atteint ce but. Incroyable !
On me fait signe de venir répondre à une interview,
je ne sais plus quoi dire. Je crois avoir dit un peu tout et n’importe quoi, les yeux humides, la voix tremblante. Aucun mot ne pouvait vraiment décrire cette sensation, un mélange de satisfaction, de bonheur, et de rêve. Pourtant cela est bien réel, je ne rêve pas.
Ce n’est qu’une fois déséquipé, douché, dans la chambre de l’hôtel le soir, que les esprits s’apaisent, que nous réalisons tout et cela de plus en plus chaque jour qui suit.
Il est l’heure de rentrer en France,
avec la satisfaction du travail accompli. Maintenant il va falloir se remettre au travail et se fixer un autre objectif, un nouveau rêve : ramener une médaille paralympique. Fini le temps de vouloir aller aux Jeux, maintenant il faut vouloir y exister. Ne pas juste y faire de la figuration. Et nous avons pour ça 5 mois de préparation, 5 mois d’entrainements et d’améliorations pour être encore plus fort, espérer aller titiller les 5 meilleurs nations qui sont devant nous dans le ranking mondial.
Mais en faites non,
nous sommes le 17 mars, le confinement vient de tomber, interdiction de s’entrainer ni de sortir… Les jeux sont décalés d’un an, le 23 août 2021. Ce n’est pas grave, nos 5 mois de préparation se transforment en 17 mois. Donc qui dit plus de temps, dit plus de progrès. Nous ne faisons que progresser depuis des années, le temps n’est que bénéfique pour nous.
Verdin Sébastien
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